mercredi 18 avril 2012

Le dernier carré


Toutes les femmes de ma vie ont des enfants. Certaines n'en ont qu'un un seul, d'autres plusieurs. Certaines travaillent, d'autres pas.

L'avantage d'avoir des amis qui ont des enfants, c'est que l'on peut échanger sur notre quotidien.

Parfois on en rit. Parfois on en pleure.

Je fais partie de celles qui ont gagné à la loterie de l'enfant différent et mon quotidien est plutôt différent de celles qui n'ont rien raflé lors du tirage.

Depuis bientôt deux ans, ma vie n'est centrée que sur une chose : mon enfant. Je pense à lui tout le temps. Je pense à son passé (avant les problématiques), à son présent et à son futur. Je pense à lui quand je suis dans ma voiture, quand je suis au boulot, quand je suis avec des amis et même quand je suis avec lui. Je l'observe, je l'analyse, je l'évalue, je me questionne... j'ambitionne.

Quand le téléphone sonne et que l'afficheur indique le nom de son école, je sais que ma journée vient de faire un 180 degrés. Si je suis au boulot, je sais que je devrai probablement quitter. Si je suis en train de faire les courses, il m'arrive de ne pas prendre le temps de payer et de partir en laissant mes trucs au centre de l'allée la plus étroite du magasin. Quand j'ai de la visite (rares sont les fois où j'ai de la visite!), je dois parfois leur demander de finir leur petit café et leur montrer la porte. Bien sûr, mes visiteuses ont chaque fois compris. Chaque fois, je leur ai dit que l'on remettrait cela, mais ça n'a jamais été remis.

Je me suis toujours considérée forte, créative et pleine de ressources. Je n'ai jamais hésité à solliciter de l'aide auprès de ceux en qui j'ai confiance et je n'ai jamais minimisé l'impact de tous les désagréments que peut causer le fait d'être une maman différente.

Mais près de 2 ans après le début de cette aventure, je regarde le chemin parcouru et je me demande parfois si j'aurai la force de continuer encore bien longtemps. Combien de temps encore pourrai-je vivre ainsi, sur le qui-vive, et prête à intervenir pour mon enfant?

Combien de temps pourrai-je encore concilier famille-travail-et-différence? Quand est-ce que l'on réalise que l'élastique risque de fendre ou que le gouffre nous attend au prochain tournant? Comment fait-on pour s'arrêter et prendre le temps de guérir les blessures que l'on se plaît à beurrer d'onguents et à couvrir de pansements qui finissent tous par décoller et avoir besoin d'être remplacé?

Je souris encore (et mon sourire est sincère), j'arrive encore à rigoler et à avoir du plaisir dans la vie, mais (trop) souvent, je réalise que je ne veux jamais être là où je suis quand j'y suis. Au boulot, je voudrais être à la maison. À la maison, je voudrais être au gym. Au gym, je voudrais être avec mon conjoint. Avec mon conjoint, je voudrais que nous soyons avec les enfants.

Je ne sais pas quand l'élastique m'avertira qu'il est sur le point de rompre, mais clairement, cette semaine, j'ai pris le dernier petit carré du rouleau du meilleur que j'avais à donner...


3 commentaires:

  1. Je suis dans les mêmes réflexions en ce moment (pour des raisons bien différentes par contre) et je crois que lorsque l'on se pose la question "Quand est-ce que mon élastique se rompra?", c'est que la situation commence à être fragile...

    Je laisse rarement ma trace chez toi, mais c'est toujours avec beaucoup d'émotions que je lis tes billets. Je ne peux te dire qu'une chose : prends soin de toi, quand l'élastique pète, ce n'est jamais agréable...

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    1. Merci pour tes mots. Je crois bien qu'il est temps de prendre le temps de m'arrêter un peu...
      Merci de me lire et de laisser ta trace!
      Michelle

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  2. Je ne trouve pas les mots justes pour te dire à quel point ton billet me touche. Ce que je peux te dire, c'est rassure-toi, même si ton élastique vient qu'à se rompre, il y aura toujours un filet de sauvetage pour te retenir. C'est dans ces moments malheureusement qu'on réalise à quel point on a des renforts insoupçonnés. Grose bise!

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